Lukas Rass-Masson,
Professeur à l’Université de Toulouse-Capitole,
Directeur de l’Ecole européenne de droit de Toulouse.
L’efficience des politiques économiques requiert une prévisibilité des opérations d’investissement et d’échanges pour lesquels un système juridique bien structuré, doté de mécanismes de règlements des litiges efficaces est un atout majeur. Ce constat vaut autant pour la protection des investissements étrangers que pour les relations commerciales, dont les enjeux sont souvent considérables, qu’il s’agisse d’opérations ponctuelles d’envergure, ou de relations contractuelles « de masse ».
Les mécanismes de règlements des différends internationaux portant sur des opérations d’investissement ou des relations commerciales occupent donc une place particulière dans les politiques économiques d’un pays ou d’une organisation régionale cherchant à construire une zone de libre-échange. Il n’est donc guère surprenant que le développement économique de la région d’Asie orientale (définie ici comme l’« ASEAN plus trois ») s’accompagne aussi de la création d’organes de règlement des litiges internationaux dédiés (spécialement la China International Commercial Court (CICC) et la Singapore International Commercial Court (SICC)), tout comme l’influence des pays d’Asie orientale sur les processus d’élaboration des règles internationales devient de plus en plus perceptible (comme l’illustrent les évolutions récentes au sein de la Conférence de La Haye de droit international privé).
Les mécanismes de règlement des litiges économiques internationaux, dans le contexte du pivotement des échanges commerciaux vers l’Asie-Pacifique sont donc un domaine qui nécessite une étude plus approfondie, afin d'évaluer comment l'influence économique de cette zone se traduit par une adaptation des règles juridiques héritées d’un temps où prédominait ce qui peut être perçue comme une influence européenne et anglo-saxonne. L’attractivité des États d’Asie orientale est en effet telle que les instruments et outils juridiques internationaux doivent évoluer pour être compatibles avec les systèmes juridiques asiatiques. Les autres puissances économiques doivent également s’y adapter, et nous analyserons comment celles-ci, et notamment l’Union européenne, pourront faire évoluer leurs règles pour maintenir et soutenir les relations économiques avec l'Asie orientale.
L’attractivité asiatique est clairement perceptible au regard des mécanismes de règlements des différends économiques internationaux, et nous proposons d’en explorer les principaux enjeux et confirmations, tout en en tirant les conséquences sur la compréhension du cadre juridique international pour les opérations commerciales et d’investissements étrangers.