Michel Trochu
Professeur émérite de l’Université de Tours
Ancien Expert juridique auprès du Parlement européen
La présence de la Chine en Afrique est multiforme.
Sur le plan institutionnel, si la Chine souhaite remodeler les institutions multilatérales et en créer de nouvelles, elle doit s’appuyer sur sa capacité à obtenir le soutien du Sud à ses initiatives mondiales. L’Afrique est, en effet, le bloc le plus important à l’Assemblée générale des Nations unies ( ONU ) avec 28% des voix, contre 27% pour l’Asie, 17% pour les Amériques et 15% pour l’Europe occidentale. Et les pays africains sont, actuellement, les supports de la Chine pour isoler Tapei : à l’heure actuelle,, un seul Etat africain, - l’Eswatini- reconnait Taïwan.
Sur le plan économique, la Chine représentait 3% des investissements étrangers en Afrique il y a 20 ans et a dépassé 20% en 2021, constate P. Dupoux, Directeur associé senior à BCG. Il souligne, également, l’originalité de la logique d’investissement : « les critères d’investissement européens ou américains reposent beaucoup sur le risque- pays alors que pour les chinois, c’est presque l’inverse. Plus un pays est risqué, moins les acteurs seront nombreux et plus leurs opérations auront des chances d’aboutir. »
Toutefois, même si selon le président chinois, la Chine demeure le partenaire le plus »fiable » de l’Afrique, son partenariat pose, cependant, certaines questions avec les problématiques de la corruption, de la protection des droits de l’homme et de la bonne gouvernance.
Enfin, sur le plan militaire, la Chine a adopté, en 2015, une loi autorisant le déploiement à l’étranger de l’Armée populaire de libération ( APL ) et des autres forces de sécurité chinoises. Deux ans plus tard, Pékin a établi sa première base navale à Djibouti et le projet d’ajouter une nouvelle base navale en Afrique soulève, actuellement, des questions sur la stratégie de plus en plus militarisée de la Chine et peut alimenter les craintes d’une atteinte à la souveraineté.
Face à cette réalité, il importera, en particulier, d’analyser les comportements de grandes puissances comme l’Union européenne et la Russie.